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Les documents du TTIP peuvent être publiés, selon la Cour de justice européenne

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La victoire de Sophie int’l Veld à la Cour de justice européenne pourrait lever le voile sur les négociations transatlantiques

Euractiv | 4 juillet 2014

Les documents du TTIP peuvent être publiés, selon la Cour de justice européenne

Un arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne le 3 juillet ouvre la voie à la publication des documents portant sur les négociations du TTIP. La Cour juge que les textes portant sur les questions internationales ne doivent pas être systématiquement confidentiels.

Le Partenariat transatlantique actuellement négocié entre l’Union européenne et les États-Unis, soulève de grandes inquiétudes de part et d’autre de l’Atlantique. S’il est ratifié, ce serait l’accord commercial le plus important de l’histoire et concernera la majorité des biens et services produits. Le sixième cycle de négociation devrait commencer ce mois-ci.

Alors que la Commission européenne qualifie les négociations de transparentes, certaines organisations de la société civile et eurodéputés, parmi lesquels Martin Schulz, réclament plus d’informations.

>>Lire : Martin Schulz veut plus de transparence dans les négociations sur le partenariat transatlantique

La CJUE a rendu un arrêt le 3 juillet après avoir été saisie par l’eurodéputée libérale, Sophie in’t Veld contre le Conseil des ministres afférent à l’accès d’un avis juridique sur les transferts de données bancaires vers les États-Unis.

Le cas ne portait pas sur le TTIP mais l’arrêt porte sur un point du droit concernant la réglementation européenne quant à l’accès à certains documents et renforce les chances d’obtenir des documents européens sur un accord commercial.

Les juges européens considèrent en effet que les documents qui se rapportent au champ international, catégorie à laquelle appartient le TTIP, ne doivent pas être systématiquement considérés comme exemptés du principe de transparence. 

Le Conseil est prié de fournir des raisons précises justifiant le refus de rendre public tel ou tel document. Dans cette affaire, le Conseil avait avancé qu’il lui fallait un vaste pouvoir discrétionnaire pour tout document qui pourrait menacer les intérêts de l’UE.

Un pas en avant

Les documents de négociations, ou portant sur une stratégie de négociation, ou révélant les positions des parties étrangères quant à des négociations, sont exemptés sont exemptés du principe de transparence. Mais d’autres documents pourraient faire l’objet d’une demande, ce qui pourrait contribuer à faire la lumière sur la stratégie développée par les institutions européennes, ont indiqué des avocats à EurActiv.

La Commission européenne publie régulièrement des documents sur le TTIP sur son site Internet et tient des conférences de presse pour faire le point sur l’avancée des négociations. Elle fournit plus d’information sur le processus de négociation en lien avec le Parlement européen que ce que stipule à l’origine le traité de 

« Ce jugement rend possible le dépôt d’une demande pour tout document qui comprend des avis juridiques sur les négociations sur le TTIP, avec de bonnes chances de l’obtenir. On pourrait notamment demander des documents sur les OGM et la protection des données» assure Steven Peers, professeur de droit européen et des droits de l’homme à l’Université d’Essex.

En revanche, selon l’expert, le Conseil et la Commission peuvent toujours s’opposer à donner accès à leur mandat de négociation et à des passages d’avis juridiques compris dans le mandat. «Au bout du compte, c’est un progrès bien modeste » estime Steven Peers.

Sophie In’t Veld a indiqué pour sa part que l’arrêt pourrait renforcer la transparence dans le cadre des négociations sur le TTIP, notamment quand il y a une pression du côté de l’opinion publique pour plus de transparence.

« Je pense que les négociateurs auront en tête cet arrêt de la Cour et pourraient y réfléchir à deux fois avant de rendre confidentiel un document », a-t-elle expliqué à EurActiv.

L’arrêt pourrait permettre à des journalistes, responsables politiques et autres militants d’accéder aux textes intéressants, selon l’eurodéputée.

L’accord SWIFT

Sophie in’t Veld avait demandé en juillet 2009 l’accès à un avis du service juridique du Conseil sur le système européen de surveillance du terrorisme et sur l’accord SWIFT.

L’accord SWIFT avec les États-Unis prévoit le partage de données bancaires personnelles, comportant des informations telles que le nom et l’adresse du payeur et du payé. Après que le Conseil lui a refusé l’accès à l’avis juridique, Sophie in’t Veld a fait un recours auprès de la CJUE.

L’avocat Onno Brouwer a représenté l’eurodéputée libérale devant la Cour de justice de l’Union européenne. Selon lui , c’est « une grande victoire pour Sophie in ’t Veld et le citoyen européen que la Cour ait rappelé le Conseil à l’ordre».

«Notamment, la Cour met en demeure cette institution de démontrer à l’avenir que la divulgation d’un document nuit effectivement à l’intérêt public. C’est d’une grande importance pratique pour les journalistes, les groupes d’intérêt et tous ceux qui désirent obtenir l’accès aux documents de l’UE».

Les juges soutiennent la décision rendue en première instance selon laquelle le principe de négociations ne pouvait être considéré comme un argument pour refuser l’accès à des documents. C’est un point particulièrement important dans le cas du TTIP, puisque les négociations vont se poursuivre jusqu’à la fin de l’année.

Le principe de transparence est de mise, même si le Conseil ne légifère pas. La Cour a statué et tombe d’accord avec la décision rendue en première instance sur le fait que l’intérêt public ne peut pas passer après la nécessité de protection des avis juridiques, comme a pu l’affirmer le Conseil.

¨Pour Sophie in’t Veld « la justice européenne stipule clairement que la transparence est une condition préalable pour une Europe véritablement démocratique. L’Union européenne doit se défaire de ses traditions diplomatiques faites de discrétion et de confidentialité pour aller vers une Europe des citoyens, reposant sur la transparence et la confiance ». 


 source: EurActiv