Accord UE-Mercosur : en quoi consiste le filet de sécurité prévu pour les agriculteurs européens ?
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Euronews | 23 janvier 2025
Accord UE-Mercosur : en quoi consiste le filet de sécurité prévu pour les agriculteurs européens ?
Par Gerardo Fortuna
La Commission européenne a proposé un soutien financier aux agriculteurs affectés par l’accord commercial UE-Mercosur, mais ce filet de sécurité ne serait déclenché que dans le "pire des scénarios" et l’exécutif européen affirme qu’il ne sera pas nécessaire.
Sans attendre la ratification controversée du traité de libre-échange avec les pays du Mercosur, la Commission européenne tente de rassurer les agriculteurs européens. Ces derniers craignent des perturbations sur les marchés européens, en particulier dans des secteurs sensibles tels que le bœuf et la volaille face à la concurrence sud-américaine (Brésil et Argentine notamment).
Face à la grogne des agriculteurs français et polonais, l’Union européenne a déjà promis d’introduire des mesures de sauvegarde. Mais les récentes communications sur ces garde-fous ont semé la confusion.
Lors d’une audition avec des députés européens la semaine dernière, le commissaire européen au commerce, Maros Sefcovic, a néanmoins mentionné un "fonds" potentiel pour soutenir les agriculteurs si le Mercosur devait nuire à l’agriculture européenne. Il l’a décrit comme une "réserve d’une valeur d’au moins un milliard d’euros", la comparant à une garantie - un mécanisme qui n’entre en jeu qu’en cas de problème.
L’ambiguïté sur la question de savoir s’il s’agit d’un "fonds" ou d’une "réserve" a déstabilisé le secteur agricole. Un fonds implique une garantie d’argent pour les agriculteurs, tandis qu’une réserve ne serait déboursée qu’en réponse à des crises spécifiques.
Pour compliquer encore les choses, un représentant de la Commission a nié l’existence d’un fonds de compensation lors d’une réunion technique avec les ambassadeurs de l’UE en début de semaine, le qualifiant de "réserve supplémentaire".
"Que l’on parle de fonds ou de réserve, l’intention est d’en faire une sorte de police d’assurance pour nos agriculteurs et nos zones rurales", a déclaré un porte-parole de la Commission à euronews.
En quoi consiste exactement cette police d’assurance ?
Réserve ou fonds ?
Ce que nous savons pour l’instant, c’est que cet argent sera alloué par la Commission dans le cadre de la proposition de budget à long terme de l’UE, ce qui indique clairement qu’il fera partie de la politique agricole commune (PAC), le programme de subventions agricoles de l’UE.
Dans la PAC, la distinction entre une réserve et un fonds est importante : un fonds fournit un soutien financier proactif pour stimuler les secteurs ou prévenir les crises, tandis qu’une réserve est réactive - l’argent n’est libéré qu’en cas de crise.
Par exemple, le programme de subventions de l’UE comprend deux fonds principaux : le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA), qui alloue 291 milliards d’euros aux régimes d’aide au revenu, et le Fonds de développement rural, doté d’un budget de 95,5 milliards d’euros dans le cadre actuel de sept ans.
En outre, la PAC comprend une réserve agricole annuelle de 450 millions d’euros, qui n’est activée que dans des circonstances exceptionnelles. La réserve proposée par le Mercosur semble suivre ce modèle et pourrait même compléter la réserve agricole existante.
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Un filet de sécurité pour les agriculteurs
Malgré la confusion qui règne autour de ces termes, les fonctionnaires de la Commission ont insisté sur le fait que cette réserve est purement préventive.
"Une réserve d’argent serait disponible dans le pire des scénarios", a déclaré un porte-parole, soulignant que la Commission ne s’attend pas à devoir l’utiliser.
Les fonctionnaires sont convaincus que les garde-fous intégrés dans l’accord du Mercosur protégeront le secteur agricole de l’UE. Il s’agit notamment d’une surveillance étroite de l’évolution du marché et de limites strictes concernant la part de marché maximale des importations de produits agroalimentaires sensibles en provenance des pays du Mercosur.
"Nous sommes convaincus que l’accord fonctionnera correctement et ne perturbera pas le marché. Néanmoins, nous voulons garantir qu’il n’y aura pas de répercussions négatives pour les agriculteurs et les zones rurales", a assuré le commissaire Sefcovic aux eurodéputés.
L’UE a déjà eu recours à des mesures similaires par le passé. En 2020, la réserve d’ajustement au Brexit (BAR) de 5,5 milliards d’euros a été créée pour atténuer les perturbations économiques liées au retrait du Royaume-Uni.
Cependant, les retards et les critères vagues pour accéder aux fonds de la BAR ont frustré certains agriculteurs, comme les producteurs de betteraves sucrières, qui affirment qu’ils n’ont pas encore reçu d’aide.
"Malgré la perte des exportations vers le Royaume-Uni, les producteurs de l’UE n’ont jamais vu cet argent", a déclaré le lobby des producteurs de betteraves sucrières de l’UE, la CIBE, dans un message sur les réseaux sociaux.
Avec la réserve du Mercosur, la Commission espère éviter des problèmes similaires et rassurer les agriculteurs européens en leur montrant qu’ils peuvent compter sur un soutien si l’accord commercial leur cause des difficultés involontaires.