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Faut-il avoir peur de l’APE ?

Jeune Afrique | mardi 23 septembre 2014

Libre-échange
Faut-il avoir peur de l’APE ?

Olivier Caslin

Après plus de dix ans de négociations, l’accord de partenariat économique a enfin été conclu entre l’Union européenne et une grande partie de l’Afrique subsaharienne... Mais crée toujours autant la polémique.

Le 10 février 2014 fera date dans l’histoire mouvementée des relations commerciales entre l’Union européenne (UE) et l’Afrique subsaharienne. En parvenant contre toute attente à un consensus, après plus de dix ans d’âpres discussions, les négociateurs européens et leurs homologues ouest-africains donnent enfin le coup d’envoi de l’accord de partenariat économique (APE), censé succéder aux conventions ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique), signées depuis 1975 entre l’Union et les pays du Sud.

Les chefs d’État de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) signent le document en juillet, suivis quelques jours plus tard par une partie de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), puis par le Cameroun.

Un véritable soulagement pour les Européens, qui, jusque-là, n’avaient pu convaincre que Maurice, les Seychelles, Madagascar et le Zimbabwe.

Véritable accord de libre-échange, l’APE contient pour la première fois le principe de réciprocité imposé par l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Il prévoit la suppression des droits de douane pour les importations vers l’Europe et une réduction progressive de ces mêmes barrières dans l’autre sens.

La carotte et le bâton

Pour vaincre les dernières résistances, l’UE a su manier la carotte, en acceptant de ne libéraliser que 75 % des marchés signataires, et le bâton, en menaçant les réfractaires de revenir sur l’accès préférentiel dont bénéficient leurs exportations vers l’Europe.

En Afrique de l’Ouest, Bruxelles a également pu compter sur les agendas politiques propres à certains chefs d’État.

Favorable par conviction à l’APE, le président ivoirien, Alassane Ouattara, a profité de sa présidence de la Cedeao pour user de toute son influence, aidé par son homologue sénégalais Macky Sall, devenu "facilitateur" et non plus simple négociateur. Celui-ci a joué à fond la carte diplomatique jusqu’à obtenir son "compromis de Dakar" début 2014.

Même le Nigeria, toujours opposé à l’accord en juin dernier par "réalisme économique", a su se montrer plus conciliant depuis qu’il espère un soutien occidental pour lutter contre Boko Haram. Seuls aujourd’hui les pays de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) manquent à l’appel. Ils ont jusqu’au 1er octobre pour accepter une offre européenne dont ils n’ont pour l’instant pas voulu entendre parler.

L’APE est loin de faire l’unanimité sur le continent, comme le reflète la longueur des négociations. Et de nombreuses questions demeurent sur l’impact réel de ce nouveau cadre imposé à l’Afrique et à ses populations.


 source: Jeune Afrique