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Poulet chloré et bœuf aux hormones : Bientôt au menu des consommateurs européens ?

Que Choisir | 10 février 2020

Poulet chloré et bœuf aux hormones : Bientôt au menu des consommateurs européens ?

par Alain Bazot, Président de l’UFC - Que Choisir

Depuis plusieurs mois Donald Trump se montre offensif sur le terrain des relations commerciales. Et cette fois c’est au tour de l’Union européenne d’être dans sa ligne de mire. Alors que l’inquiétant TTIP (ex-TAFTA) a été, fort heureusement, écarté, voici que le président américain revient à la charge, indiquant que pour que les USA se remettent autour de la table des négociations commerciales avec l’UE, il faut, au préalable, que l’Union abdique sur le bœuf aux hormones et le poulet chloré… Une nouvelle impossible à digérer.

Faisons un peu d’Histoire. 1980 et le veau aux hormones, combat emblématique de l’UFC-Que Choisir qui, après le lancement du boycott provoquant la chute de la consommation, amène l’Europe à interdire les hormones dans la viande ; je passe sur le scandale sanitaire de la vache folle qui se déclenche en 1996, et à l’occasion de laquelle nous exigeons et obtenons notamment, avec l’interdiction des farines animales, la traçabilité et davantage d’information ; début des années 2000, nous contribuons au sein de la Commission Coppens à l’affirmation du principe de précaution qui sera dans la Charte de l’environnement. Alors, va-t-on détricoter toutes ces avancées d’intérêt général ? Contrairement à l’Union européenne, les États-Unis n’appliquent pas le principe de précaution et sont revenus à la charge pour l’écarter, purement et simplement, au nom de la liberté de commerce. L’administration Trump cherche à lever les interdictions, y compris pour le poulet chloré. Si l’on accepte l’importation dans ces conditions, les consommateurs européens courront un risque sanitaire. L’Union européenne impose en effet que chaque étape de transformation alimentaire maintienne le plus haut niveau d’hygiène. Or, il se trouve que ce n’est pas le cas dans le reste du monde : c’est seulement à la fin du processus qu’est mise en place une procédure de désinfection qui consiste à enlever la contamination de la carcasse en la « trempouillant » dans une solution de javel à l’efficacité non démontrée…

Craignons en outre l’effet domino : si l’on accepte des produits avec des standards hygiéniques moins élevés et moins coûteux, cela marquera le début de la capitulation. Il s’agit là d’un véritable cheval de Troie, car on ne pourra plus attendre le même niveau d’exigence de nos propres producteurs qui plaideront la concurrence déloyale. Cela signifierait donc l’abandon de la philosophie sanitaire patiemment construite au niveau européen.

Je m’étonne de l’absence de réactions du gouvernement français alors même que les risques sont très clairs pour les consommateurs mais aussi les producteurs français et européens. Ce silence m’inquiète d’autant plus qu’il intervient dans la continuité de l’application provisoire du CETA, accord de libre-échange à hauts risques, sanitaires et environnementaux, savamment maintenue de manière indéfinie par le gouvernement, qui n’a toujours pas inscrit le texte de ratification (adopté in extremis à l’été à l’Assemblée) à l’ordre du jour du Sénat… Il est hors de question d’accepter que des intérêts, strictement commerciaux, prennent le pas sur l’exigence politique des citoyens soucieux de la préservation d’un cadre normatif propre à leur donner confiance dans ce qu’on leur propose de manger.


 Fuente: Que Choisir