Commerce, climat et droits de l’Homme : un sommet sino-européen sur fond de tensions

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France 24 | 14 septembre 2020

Commerce, climat et droits de l’Homme : un sommet sino-européen sur fond de tensions

Lors d’un sommet virtuel lundi, l’UE a exhorté la Chine à ouvrir davantage son marché aux entreprises européennes si elle veut parvenir à un accord bilatéral sur les investissements avant fin 2020, tout en exprimant ses préoccupations sur Hong Kong et le sort de la minorité musulmane ouïghoure.

Avancer dans les négociations sur les investissements et le commerce malgré des tensions croissantes, notamment sur Hong Kong : une vidéoconférence aux forts enjeux économiques et politiques a commencé lundi 14 septembre entre Charles Michel, le chef du Conseil européen (qui représente les 27 de l’UE), Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, Angela Merkel, la chancelière allemande, et Xi Jinping, le président chinois.

À l’origine, ce sommet à Leipzig avec les dirigeants des 27 pays de l’UE et leur homologue chinois devait représenter un grand moment des six mois de la présidence allemande de l’UE. Mais en raison de la pandémie, la rencontre, désormais virtuelle, se tient en format réduit.

Au menu des discussions, qui ont débuté peu après 14 h (12 h GMT), selon un porte-parole : l’épineux accord sino-européen sur les investissements, dont la conclusion d’ici la fin de l’année est jugée "possible" par Pékin.

Cet accord sur les investissements doit permettre, d’après les Européens, de voir leurs entreprises traitées de la même manière en Chine que les entreprises chinoises sont traitées dans l’Union. Les 27 exigent un meilleur respect de la propriété intellectuelle, la fin des transferts de technologie imposés aux firmes étrangères en Chine et des subventions excessives aux entreprises publiques chinoises.

Un accord commercial attendu

Cet accord sera-t-il signé d’ici décembre ? "Il y a encore beaucoup à faire", a reconnu devant la presse la présidente de la Commission européenne après la réunion virtuelle. "Nous sommes très sérieux quant au fait d’avoir accès au marché chinois et d’abolir les barrières", a déclaré Ursula von der Leyen.

"Globalement, la coopération avec la Chine doit se fonder sur certains principes – la réciprocité, la concurrence juste. Nous avons des systèmes sociaux différents mais si nous sommes attachés au multilatéralisme, il doit être basé sur des règles", a affirmé, de son côté, la chancelière allemande à la presse depuis Berlin.

Invité sur France 24, Antoine Bondaz, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique et spécialiste de la Chine ne note "pas d’avancée véritablement importante", hormis "quelques avancées sur les questions de réciprocité".

Le commerce bilatéral sino-européen représente plus d’un milliard de dollars par jour. L’UE est le principal partenaire commercial de la Chine tandis que cette dernière est le deuxième marché, derrière les États-Unis, pour les biens et services européens.

On ignore quelle a été la réponse de la Chine aux demandes européennes. Il n’y a pas eu de communiqué commun et la réaction de Pékin n’a pas été abordée lors de la conférence de presse organisée après le sommet.

Autre dossier sur la table, le climat : alors que l’UE se donne un objectif de neutralité carbone pour 2050, les Européens veulent pousser Pékin à muscler ses ambitions en visant une neutralité carbone en 2060, un pic d’émissions de CO2 dès 2025 et en cessant la construction de centrales à charbon.

"La Chine est un partenaire clé pour réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre. L’UE met la barre haut et compte sur la Chine pour faire de même", a commenté Charles Michel.

Selon Antoine Bondaz, le champ d’action des Européens reste toutefois très limité. "Ils ont très peu de moyens de pression direct" sur Pékin, affirme-t-il, ajoutant que "la Chine n’a pas pris d’engagement supplémentaire par rapport à ceux qu’elle avait pris dans le cadre des accords de Paris."

"Les voix démocratiques à Hong Kong doivent être entendues"

Alors que cette réunion intervient sur fond de guerre commerciale et diplomatique croissante entre Pékin et Washington, l’UE cherche à trouver l’équilibre, en faisant avancer ses intérêts économiques tout en affirmant ses positions sur les droits humains.

"Nous réitérons nos préoccupations sur le traitement par la Chine des minorités au Xinjiang et au Tibet, ainsi que sur le sort réservé aux défenseurs des droits de l’Homme et des journalistes (...) l’un des points importants aujourd’hui est la proposition de mener des visites" d’observateurs dans les régions concernées, a insisté Charles Michel.

Pour Antoine Bondaz, il faudrait toutefois que ces observateurs "puissent aller où ils veulent et notamment mener une enquête précise sur ce qui est considéré aujourd’hui comme des violations des droits de l’Homme".

Les États-Unis quant à eux ont adopté des sanctions ciblées contre des dirigeants politiques, entités et entreprises impliqués au Xinjiang.

Les Européens ont exprimé à Xi Jinping leurs préoccupations persistantes sur Hong Kong, où l’application d’une nouvelle loi sécuritaire constitue, selon eux, une attaque contre les libertés du territoire semi-autonome. Les 27 avaient déjà décidé de limiter les exportations d’équipements utilisables pour la surveillance et la répression à Hong Kong.

Cette loi "continue d’alimenter de sérieuses inquiétudes (...) Les voix démocratiques à Hong Kong doivent être entendues, les droits protégés et l’autonomie préservée", a martelé Charles Michel.

Avec AFP et Reuters

source : France 24

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