Dans sa stratégie post-Brexit, Boris Johnson mise aussi sur l’Inde

L’Opinion | 21 avril 2022

Dans sa stratégie post-Brexit, Boris Johnson mise aussi sur l’Inde

Par Claude Leblanc

Les faits - Pour son premier voyage en Inde, Ursula Von der Leyen devrait rencontrer le président Ram Nath Kovind et s’entretenir avec le Premier ministre Narendra Modi. Parmi les principaux dossiers abordés figureront la crise ukrainienne et la coopération indo-européenne, sujet prioritaire pour New Delhi, qui souhaite renforcer ses liens avec Bruxelles.

Depuis le début de l’année, l’Inde est au centre d’un jeu diplomatique complexe qui traduit bien sa position particulière de partenaire privilégié de l’Occident et de la Russie. La visite de Vladimir Poutine à New Delhi, quelques semaines avant l’invasion de l’Ukraine par les troupes russes, a marqué le début d’une séquence qui n’a cessé de s’intensifier depuis le 24 février. Les Occidentaux sont venus chercher une condamnation formelle de Moscou tandis que les Russes et leur allié chinois ont voulu s’assurer de la neutralité indienne.

Avant d’accueillir, le 24 avril, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, Narendra Modi reçoit Boris Johnson jusqu’à vendredi dans le cadre d’une visite de première importance au cours de laquelle le Premier ministre britannique entend aborder le sujet ukrainien de façon pragmatique. Celui-ci devrait exposer la position de son pays et entendre la partie indienne afin qu’il y ait une meilleure compréhension des positions respectives, indique-t-on de sources diplomatiques.

Boris Johnson veut éviter de braquer les Indiens sur l’Ukraine car il entend donner une plus grande place aux relations bilatérales qui s’intègrent dans sa stratégie de retrouver une place sur la scène internationale après la sortie du Royaume Uni de l’Union européenne. Avant son arrivée, il a déclaré qu’il entrevoyait de « vastes possibilités » de réalisation commune entre les deux pays dans des domaines allant « des télécommunications 5G de nouvelle génération à l’intelligence artificielle en passant par de nouveaux partenariats dans la recherche en santé et les énergies renouvelables ».

Bienveillance En entamant sa visite par l’Etat du Gujarat, où il visitera l’Université de biotechnologie et une entreprise britannique implantée dans la région, le Premier ministre britannique indique clairement l’orientation de son voyage. Pendant son séjour au Gujarat, il va annoncer plusieurs accords commerciaux et des sociétés britanniques et indiennes confirmeront plus d’un milliard de livres sterling de nouveaux investissements ainsi que des accords d’exportation dans des secteurs comme l’ingénierie logicielle et la santé.

Londres mise aussi sur un deal global de libre-échange avec New Delhi alors que le gouvernement indien souhaite procéder par étapes avec un accord intermédiaire avant d’aborder les sujets plus complexes. Il s’agit d’une approche pragmatique qui donnera rapidement des résultats tangibles pour les deux partenaires, tandis que d’autres questions complexes seront négociées ultérieurement, indique-t-on du côté indien. Les négociations officielles de l’Accord de libre-échange ont débuté, le 13 janvier, et les deux partenaires se sont fixés pour objectif de doubler les échanges de biens et de services pour les porter à 100 milliards de dollars d’ici à 2030. Le commerce bilatéral total s’élève actuellement à 50 milliards de dollars, 35 milliards concernant les services et 15 milliards les biens.

L’importance accordée aux relations commerciales pendant ce voyage ne doit pas cependant faire oublier sa dimension stratégique. Le Royaume Uni, qui s’est engagé aux côtés des Etats-Unis et de l’Australie dans un traité de sécurité, souhaite renforcer sa position en Indo-Pacifique. L’Inde qui, elle aussi, veut jouer un rôle dans cette partie du monde n’est pas insensible à l’intérêt britannique dans la mesure où elle peut ainsi élargir le nombre de ses partenaires. Voilà pourquoi le voyage de Boris Johnson est considéré avec beaucoup de bienveillance par New Delhi.

source : L’Opinion

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