Réforme portuaire

Le compte à rebours a commencé

L’Economiste, 17/10/2006
Jamal Eddine HERRADI

Entrée en vigueur de la loi le 5 décembre prochain

· Les stevedores, inquiets, font pression

Plus qu’un mois et demi nous sépare de l’entrée en vigueur de la réforme portuaire. Une réforme qui, en principe, doit «mettre fin à la situation de confusion et d’amalgame dans les missions et les responsabilités opérationnelles, régulataires et régaliennes». Le ministre de l’Equipement et du Transport, Karim Ghellab, n’y a pas été par quatre chemins, mercredi dernier, lors d’une rencontre à Casablanca avec les opérateurs (cf. www.leconomiste.com). Le message de Ghellab est certes simple, mais il est ferme: l’activité dans les ports sera assainie coûte que coûte. L’Etat y veillera et ne s’arrêtera pas en chemin quelles que soient les contraintes et les conditions.
Le Maroc a engagé ces dernières années plusieurs réformes aussi bien sur le plan économique que social. Réformes qui devraient lui permettre de se mettre à niveau en vue de mieux se positionner sur la scène internationale, notamment en développant ses performances économiques. Celles-ci dépendent en bonne partie des capacités du Royaume à exporter et donc de sa stratégie d’ouverture sur le plan international.

· Niveau de compétitivité

La signature par le Maroc d’un certain nombre d’accords commerciaux (accords de libre-échange avec les USA, avec la Turquie, avec l’UE, l’Accord d’Agadir...) renforce cette tendance à l’ouverture. Le Maroc doit être déjà prêt à relever sérieusement le défi et l’un de ses points forts réside dans sa capacité à être présent sur la scène du commerce, non seulement régional ou continental, mais également international. Le débat engagé mercredi dernier à Casablanca par Karim Ghellab (qui est aussi président de l’Arrondissement de Sbata), avec les opérateurs économiques, principalement ceux qui utilisent le port de la métropole pour leurs exportations ou importations, a montré que le gouvernement veut, un tant soit peu, donner au Maroc les moyens de s’intégrer sans trop de mal, dans la mondialisation. Seulement, comme le dira Moulay Hafid Elalamy, président de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), «il ne faut pas polluer un dossier stratégique par un dossier individuel». Le reproche est «directement» adressé au président de l’Association des agents maritimes, consignataires de navires et stevedores (Assamat), Mohamed Karia.
Ce dernier a affirmé qu’il ne faisait que défendre les intérêts des membres de son association et que son intervention «n’a rien de personnel ni d’individuel» (Karia, aussi président de la compagnie maritime IMTC, s’était vue retirer une autorisation d’exploitation de ligne maritime Tanger-Gênes). Le commandant Karia et l’Assamat ont défrayé la chronique ces derniers temps et fait les choux gras de la presse (www.leconomiste.com). Entrés en conflit direct avec le ministère de tutelle, les stevedores affirment pourtant être avec la loi sur la réforme portuaire et la vouloir (loi 15-02 relative aux ports et portant création de l’Agence nationale des ports (ANP) et de la Société d’exploitation des ports, Sodep). Mais, ils sont unanimes à «rejeter l’interprétation qui en est faite par le ministère de tutelle» et en contestent les méthodes d’application.
Alors même que cette loi ne va entrer en vigueur qu’à partir du 5 décembre prochain. «Il est de notre devoir d’anticiper et de nous défendre avant que cette loi ne soit mise en application. Après, nous ne pourrons plus le faire et nous n’aurons plus qu’à subir le diktat du département de l’Equipement», affirme Karia. «Nous ne demandons pas plus que la stricte application», ajoute-t-il. La loi en question a introduit le concept de concurrence pour mettre fin à la situation de monopole encore détenu par l’Office d’exploitation des ports (Odep) en encourageant la participation du secteur privé dans les activités portuaires. Elle prévoit ainsi que l’autorisation est accordée après appel d’offres et donc aussi appel à concurrence.

· Fin du monopole

Cela signifie, souligne Mohamed Karia, que c’est l’ensemble de l’exploitation du domaine portuaire qui doit être soumis à la concurrence selon les règles reprises dans un cahier des charges incluant les conditions d’amodiation et de location de l’outillage portuaire». Les stevedores craignent que le département de tutelle veuille continuer à soutenir les deux entités issues de l’éclatement de l’Odep alors qu’elles sont censées être privées». La réforme, s’étant fixée comme objectif de rehausser le niveau de la compétitivité des ports marocains aux standards européens et internationaux, insiste sur la concurrence. Pour les stevedores, «cette concurrence ne joue pas encore puisque le ministère de tutelle continuera à privilégier l’ANP et la Sodep au détriment des autres intervenants», estime Karia rappelant que «les deux nouveaux établissements ont hérité d’importants moyens que les autres n’ont pas».

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