Maroc: inquiétudes des opérateurs face aux accords de libre échange avec les Etats-Unis

Algérie Presse Service | le 7 octobre 2004

Maroc : inquiétudes des opérateurs face aux accords de libre échange avec les Etats-Unis

Rabat - La société civile marocaine, les industriels et les opérateurs des différents secteurs économiques craignent que les accords de libre échange signés par le Maroc avec plusieurs groupements régionaux ou dans un cadre bilatéral auront des répercussions néfastes sur l’économie marocaine, fragilisée par les accords d’ajustements structurels. Selon le patronat marocain, l’impact de l’accord de zone de libre échange entre le Maroc et les Etats-Unis, même s’il renferme beaucoup d’aspects positifs pour l’économie locale, n’en constitue pas moins "une menace sur la production nationale si des gardes fous ne sont pas mis pour protéger le produit local face au produit américain, plus compétitif".

Plusieurs groupements d’opérateurs estiment que "cet accord, qui renferme certes des aspects positifs en termes de transfert de technologie et d’apport d’investissements, n’en renferme pas moins des signes de menace sur les produits locaux qui ne peuvent rivaliser avec la qualité des produits américains, notamment dans les secteurs des textiles, des services ou de l’industrie mécanique".

Dans les milieux des professionnels de l’agroalimentaire, dont les chiffres d’affaires sont réalisés dans la filière des exportations, la même hantise est réelle quant aux impacts de cet accord sur le niveau de la compétitivité de leurs produits face aux produits américains.

Lors des négociations de l’accord de zone de libre échange avec les Etats-Unis, industriels et agriculteurs avaient averti le gouvernement contre les effets pervers de certaines clauses de cet accord autant sur le niveau des investissements qui iront en baisse que sur celui de la faible compétitivité des produits locaux face aux produits américains, largement subventionnés.

La zone de libre échange entre les Etats-Unis et le Maroc sera effective dés le 1er janvier 2005. Plusieurs ONG marocaines avaient dénoncé cet accord qui va "ruiner l’économie marocaine, ralentir sa croissance et paupériser davantage la population, sur fond de baisse dramatique du niveau de vie moyen".

Autre menace, plus immédiate: l’accord de zone de libre échange, dit accord d’Agadir, signé entre le Maroc, la Jordanie, l’Egypte et la Tunisie provoque actuellement les pires inquiétudes dans les milieux agricoles marocains spécialisés dans la filière rizicole, ainsi que parmi les industriels spécialisés dans cette filière.

Avec la fin de la période de transition dés janvier 2005, agriculteurs et industriels de la filière riz s’inquiètent de l’arrivée massive de riz égyptien, de meilleure qualité et à moindre coût de production.

L’inquiétude de l’association professionnelle des rizeries du Maroc, ainsi que d’autres filières agro-industrielles, est réelle avec l’arrivée, dés janvier 2005 de produits agricoles, importés dans le cadre de ces accords de libre échange, plus compétitifs et de meilleure qualité.

"Ce n’est pas seulement l’usinage qui va en pâtir, mais toute la filière", estime-t-on au sein de l’association des rizeries du Maroc.

La menace est d’autant réelle que le gouvernement marocain, en vertu même de certaines clauses restrictives contenus dans ces accords de libre échange, ne peut se permettre "le luxe de subventionner son agriculture", encore moins "soutenir les produits à l’exportation", estiment des économistes.

Par ailleurs, plusieurs ONG marocaines estiment que "la course du Maroc à ratifier au pas de charge des accords de libre échange avec plusieurs pays et groupements économiques et politiques régionaux, devrait lui coûter très cher au plan économique et social".

L’économie marocaine est toujours surveillée par le Fonds monétaire international (FMI) dans le cadre du dernier plan d’ajustement structurel. Selon le FMI, le Maroc doit maintenir sa croissance autour de 5 à 7 % par an pour arriver à équilibrer ses grands agrégats économiques, avec une réduction du déficit budgétaire à moins de 1 %. La course à la conclusion d’accord de libre échange "n’est pas forcément la meilleure manière pour relancer la croissance, stimuler les investissements et améliorer le niveau de la production industrielle et agricole", relèvent des économistes selon lesquels "ces accords vont tarir les sources de recettes douanières".

Le gouvernement marocain, qui a des difficultés à boucler son budget 2005, n’arrive non seulement pas à trouver des capitaux dans la privatisation (moins de 4 milliards de dirhams prévus en 2005), le report de la vente de 15 % supplémentaires du capital de Maroc Télécom à Vivendi Universal, mais devra également se résoudre à une baisse importante des recettes fiscales douanières du fait de l’entrée en vigueur de plusieurs des accords de libre échange stipulant l’élimination des droits de douane.

"Pour avoir trop cherché à ouvrir son économie, à la libéraliser à travers des accords de libre échange tous azimuts, le Maroc est aujourd’hui acculé à trouver des solutions urgentes pour maintenir son niveau de croissance à au moins 4 % du PIB dans les années prochaines, sans rogner sur les acquis sociaux", soulignent des économistes membres d’ONG marocaines.

source : APS

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