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Le Malawi reste ferme sur les conditions de signature de l’APE

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IPS | 3 août 2010

Le Malawi reste ferme sur les conditions de signature de l’APE

Claire Ngozo

BLANTYRE, Malawi, 3 août (IPS) — Le gouvernement malawite est de nouveau resté ferme face aux appels de l’Union européenne (UE) pour la signature d’un accord de partenariat économique (APE).

Le Malawi n’a pas cédé même après la visite des plus grands responsables de l’UE en Afrique australe pour le convaincre d’apposer sa signature sur le document.

La délégation de l’UE, conduite par le directeur du développement et des APE de la Commission européenne (CE), Peter Thompson, et l’ambassadeur de l’UE près le Malawi, Alexander Baum, a impliqué les responsables, au plus haut niveau, du commerce du Malawi dans une rencontre de deux jours, les 26 et 27 juillet, dans la capitale commerciale du pays, Blantyre.

Mais le Malawi a refusé de changer d’avis.

Le ministre du Commerce du pays, Eunice Kazembe, a indiqué lors de la réunion que le Malawi veut avoir une assurance claire concernant la façon dont il bénéficiera de l’APE.

Elle a déclaré que le Malawi est actuellement en situation défavorable lorsqu’on en vient au commerce dans les conditions d’un APE parce que c’est un pays moins avancé (PMA) et enclavé avec des infrastructures publiques médiocres, une productivité de travail faible, une capacité technologique insuffisante et des services publics peu fiables.

"Nous avons des intérêts à hiérarchiser. Ces défis doivent être relevés avant une libéralisation complète", a-t-elle déclaré à l’assistance.

Les pistes rurales, les infrastructures sanitaires et éducationnelles sont d’autres questions que le pays exige de clarifier avant qu’il ne signe l’APE. Le Malawi veut également accroître l’investissement dans la recherche et le développement.

Mais, l’UE n’est pas satisfaite de la manière dont la rencontre de Malawi s’est terminée. Dans un communiqué qui a suivi, Thompson a révélé la frustration et l’impatience de la CE concernant le Malawi et les autres Etats de l’Afrique, du Pacifique et des Caraïbes qui n’ont pas encore signé l’APE.

"Sept ans après leur lancement, les négociations des APE à travers les régions ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) n’avancent pas comme nous le souhaiterions. Il est temps maintenant de décider s’il y a une manière claire d’avancer ensemble et, si oui, selon quel calendrier. J’espère que les Malawites joueront un rôle actif au niveau régional et national dans cette décision", a déclaré Thompson.

Il a reconnu comme positif le consensus entre l’UE et le Malawi sur les principes fondamentaux de l’APE et le partenariat sur le ’commerce partagé’ et le développement soutenu par l’appui au développement.

Ceci, a-t-il dit, contribuerait au développement, à la croissance et à la création d’emplois à travers une libéralisation progressive et contrôlée de l’échange des marchandises sur une période raisonnable et à un ensemble de règles pour les secteurs du 21ème siècle tels que les services et l’investissement.

La rencontre, officiellement citée comme une opportunité pour "discuter du rôle du Malawi dans l’APE dans la région de l’Afrique orientale et australe (AOA), a réuni environ 90 personnes du gouvernement, du secteur privé et de la société civile.

Des représentants de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA) et du Marché commun pour l’Afrique orientale et australe (COMESA) ont également participé à cette rencontre.

Le Réseau pour la justice économique au Malawi (MEJN), un groupement d’organisations de la société civile qui défend les droits socioéconomiques des masses, faisait partie de la réunion.

"L’APE intérimaire, dans sa forme actuelle, aura pour incidence de porter atteinte à l’autonomie politique du Malawi et de provoquer un désastre pour le développement économique du pays, et par conséquent, une incidence négative sur le respect des droits sociaux des citoyens", a déclaré le directeur exécutif de MEJN, Andrew Kumbatira, à la fin de la rencontre.

Il a affirmé que l’APE va renforcer la position du Malawi comme un exportateur de matières premières agricoles de faible valeur et priver le gouvernement de marge de manœuvre politique pour utiliser les tarifs en vue de protéger les moyens d’existence et la sécurité alimentaire, et de favoriser le développement du secteur de la fabrication.

"Il est possible qu’il y ait des incidences négatives considérables sur le commerce du Malawi avec d’autres pays de la région et que cela porte atteinte aux processus d’intégration régionale en cours. Un APE risque également de conduire à la perte du revenu des tarifs et de provoquer des coûts d’ajustement considérables", a déclaré Kumbatira.

Le MEJN est en train d’exiger que les parties aux négociations de l’APE "reviennent à 2002 et commencent par là. Cela peut ne pas être une décision facile mais ce sera la décision qui donnera un sens à la coopération entre le groupe ACP et l’UE", a dit Kumbatira.

Il a déclaré aux médias que les APE ont apporté plus de défis que de solutions aux pays de l’AOA. Kumbatira a ajouté que les attentes au début des négociations en 2002 étaient de voir les APE offrir une amélioration des préférences commerciales de Lomé, en plus de les voir se conformer aux dispositions de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

"Cependant, l’APE intérimaire a des conditions qui sont pires que les préférences commerciales de Lomé. Par conséquent, le défi que nous avons en ce moment en essayant de faire avancer les négociations est de rendre les APE mieux que les préférences commerciales de Lomé. Cela ne pourra pas se faire dans l’esprit et la conduite des négociations actuelles", a déclaré Kumbatira.

En revanche, Baum a déclaré dans un communiqué que l’UE va conduire le processus des négociations avec un renforcement d’appui et de dialogue politique à travers le Fonds européen pour le développement (FED) et l’aide pour les facilités commerciales.

Baum a affirmé que l’UE est en train de travailler avec le gouvernement malawite pour répondre aux objectifs que ce dernier s’est lui-même fixés dans le cadre de son programme de développement économique.

"Il est clair, par exemple, que toutes les pertes de recettes douanières dues à l’adoption progressive des dispositions de l’APE sont de portée très limitée et que nous pouvons trouver un arrangement pour aider le Malawi à faire face à ce défi", a-t-il promis.

Mais, il reste à voir si le Malawi cédera. L’année passée, le président du Malawi Bingu wa Mutharika a promis que le pays ne signera pas l’accord avec l’UE avant que toutes les préoccupations soient résolues. "Si les APE sont bons, pourquoi nous force-t-on à signer?", a-t-il demandé.


 source: IPS