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L’espoir éteint d’un accord de libre-échange avec la Chine

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La Presse | 18 septembre 2020

L’espoir éteint d’un accord de libre-échange avec la Chine

par Jean-François Codère

« Les conditions ne sont pas réunies pour poursuivre les discussions en ce moment », a affirmé le ministre des Affaires étrangères du Canada, François-Philippe Champagne, dans une entrevue au quotidien Globe & Mail. « La Chine de 2020 n’est pas celle de 2016. »

L’espoir d’un accord était né en 2016, lorsque les premiers ministres Justin Trudeau et Li Keqiang s’étaient échangé des visites en l’espace de quelques semaines. La situation entre les deux pays s’est toutefois détériorée de façon importante, surtout en raison de l’arrestation par le Canada, le 1er décembre 2018, de la directrice financière de Huawei, Meng Wanzhou. La Chine a depuis répliqué en incarcérant deux Canadiens, Michael Kovrig et Michael Spavor.

« Les choses n’allaient pas bien, observe Ari Van Assche, professeur au département d’affaires internationales de HEC Montréal. Depuis ces arrestations, il devenait de plus en plus clair que c’était difficile de collaborer avec la Chine. »

Attentes faibles

Les attentes du milieu des affaires envers ces négociations semblaient plutôt faibles. À la fin de 2017, avant même l’arrestation de Mme Meng, Affaires internationales Canada avait publié les résultats d’une consultation tenue auprès de plus de 600 individus, entreprises et organismes pour sonder leur opinion. Il en était ressorti davantage de craintes que d’envies.

Dans le contexte, donc, la fin des pourparlers n’a étonné personne.

« Ce n’est pas une surprise, mais de le dire officiellement, ça devient difficile un, deux ou trois ans plus tard de dire qu’on va recommencer les discussions », note M. Van Assche.

Deuxième économie du monde, la Chine est aussi le deuxième partenaire commercial du Canada. Selon les données du ministère de l’Économie et de l’Innovation, ses principales importations en provenance du Québec en 2018 – avant l’arrestation de Mme Meng – étaient le fer, le soya, les véhicules, les aéronefs et le porc.

“Il n’y avait pas beaucoup d’attentes [pour les Producteurs de grains du Québec] en raison du cafouillis avec Mme Meng, mais on aurait quand même aimé un accord.” Étienne Lafrance, agent d’information sur les marchés

Les producteurs de soya ont d’eux-mêmes commencé à réduire de façon importante leurs exportations vers la Chine et à se tourner vers d’autres marchés à compter de 2019, selon M. Lafrance, en raison de l’incertitude.

C’est tout l’inverse pour les Éleveurs de porc du Québec, qui se dirigent vers une année record en 2020 selon leur président, David Duval. L’année dernière avait elle-même établi des records, même si la Chine avait fermé ses frontières au porc québécois pendant trois mois dans ce qui ressemblait à des représailles pour l’histoire de Mme Meng.

« On préfère toujours avoir une entente parce que le passé nous a démontré que quand ce n’est pas le cas, on se fait dépasser par la compétition et c’est difficile de revenir, explique M. Duval. Les autres pays vont essayer d’en avoir [des accords avec la Chine]. » Mais M. Duval admet que la nouvelle ne troublera pas son sommeil.


 source: La Presse