Les A.P.E ou la mort programmée de 90 % des Burkinabè
Burkina 24 | 17 déc 2014
Les A.P.E ou la mort programmée de 90 % des Burkinabè
Selon l’auteur de cette tribune, c’est un cri du coeur sur la menace que constituent les Accords de partenariats économiques pour le Burkina.
Si 90 % des Burkinabè sont menacés alors tout le Burkina Faso peut craindre cette mort qui arrive à grand pas. Des années d’efforts vont être anéanties par une naïveté historique bientôt révélée si rien n’est fait. L’Accord de Partenariat Économique semble avoir fait l’objet d’un « deal » contre le « Développement africain » et les pays ouest-africains, dont le Faso, vont signer « l’acte de décès » le 1er janvier 2015. Si l’on trouve trop alarmiste cet avertissement, l’avenir sera témoin de ce cri patriotique.
Qui veillera sur les intérêts des paysans Burkinabè qui seront bientôt anéantis, et nous avec ?
Depuis l’insurrection des 30 et 31 octobre derniers, le Burkina, on ne cesse plus de le répéter, a tourné une page et entreprend de rouvrir une autre. Tant que les « intellectuels africains » dont le procès reste à venir, ne veilleront pas sur les intérêts du monde paysan, d’autres « révolutions » se feront jour dans un avenir prochain.
L’Accord de Partenariat Économique avec l’Afrique de l’Ouest arrive bientôt pour « achever » le monde paysan. Où sont les « penseurs » et autres défenseurs des intérêts du Burkina ? Savent-ils seulement ce qui est en train de se tramer dans l’ombre ?
Ou en sont-ils les fervents complices ? Dans l’euphorie d’un soulèvement populaire, il est recommandé d’être vigilants, sinon « Trop tard » ne pourra plus rien faire pour les agriculteurs intègres du Faso. La détérioration des termes de l’échange et diverses incohérences, dont souffre l’Afrique depuis la nuit des temps, menacent encore le Burkina Faso. Et dire, que nous venons de fêter l’indépendance de la « Haute-Volta »…
Connaissez-vous les APE ? : une mort programmée en passe d’être appliqué bientôt
« Justice ! Justice ! » Tout le monde crie « justice » au Burkina, même ceux qui n’y ont pas cru se font donneurs de leçons à la place des « véritables martyrs ». Et, parmi ceux-ci, (et donc nous-mêmes) figurent les paysans du Faso : les parents pauvres de tout système politique africain. Voici une « injustice douce » qui conduit irrémédiablement à la tombe. Et la mort aujourd’hui arrive avec les APE*.
Quels sont les intellectuels burkinabés qui savent ce que c’est que les APE dont nous seront les malheureuses victimes sous peu ?
Commençons par le Tarif Extérieur Commun (TEC), c’est quoi ? C’est en résumé l’ensemble des droits de douane à l’importation. C’est la Communauté Économique Des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui, pendant 10 ans lutte pour y arriver. Malheureusement, elle a fixé, par exemple, son taux de riz à 10 % seulement… Alors qu’en Afrique de l’Est, ce taux est à… 35 % voire même 75 % !
Conséquence : tous les Burkinabè « riches ou pauvres » mangent un riz importé qu’on appelle « brisure de luxe » et qui est vieux de 10 ans. De qui se moque-t-on ? Des hommes intègres ? Et qui sont les complices inavoués d’une telle surexploitation des Africains dont les paysans produisent du riz frais. Et qui n’attendent que des échanges équitables ? C’est en réalité un Accord de Libre-Échanges* qui ne dit pas son vrai nom. La mauvaise nouvelle, c’est que ce fameux TEC va être validé concrètement le 1er janvier 2015 !
Évoquons maintenant l’APE. Par cet « Accord », l’Europe a encore décidé d’en finir avec l’Afrique de l’Ouest dans sa quête de liberté socio-économique. Quel groupe d’« intellectuels » a négocié ce partenariat ? Les populations sont-elles au courant, surtout des conséquences ? Qui gagne ? Qui perd ? N’est-ce pas fini l’ère des « décideurs pour les autres » ? Que va-t-il se passer après ?
Voici quelques exemples qui attendent les paysans, donc nous tous : assassinat de la production vivrière, fin de la transformation de nos produits locaux, destruction des emplois, dépendance accrue des cours des marchés mondiaux, pillage des ressources naturelles… N’évoquons plus le développement endogène, enterrons nos sublimes espoirs de voir surgir une Afrique digne et respectée. Vendons l’Afrique et allons-nous-en !
Leçons politiques et politiques du commerce international : le Burkina trahirait-il sa « Révolution » ?
Il faut apprendre désormais à lutter contre les fondements de l’injustice sinon nous sommes condamnés à être des médecins après la mort. Cela n’a que trop duré.
Ce ne sont pas que les aspects politiques qui ont mené cette « Révolution » mais, pense-t-on également, des négligences d’un monde majoritaire au pays des hommes intègres : les paysans du Faso qui nourrissent, tant bien que mal, plus de la moitié des populations, parmi lesquelles des « intellectuels en cravate » ! Les APE, cet accord, comme beaucoup de ses « parents » écrits et signés sur le dos des analphabètes, ne respectent pas l’Afrique et le Burkina. Ces textes stipulent simplement que l’Afrique ne compte vraiment plus. Entamons donc nos veillées funèbres…
Comment des paysans pourront-ils compter sur des « intellectuels » analphabètes ?
La lutte des paysans Burkinabè ne date pas d’hier. En 2005 notamment, ils ont manifesté avec force et vigueur pour dire « Au grand jamais ! » cet accord ne passera. Mais, on était encore à une dizaine d’années en arrière… Aujourd’hui nous sommes en 2014, sous une « Transition de la vérité » au Burkina.
Les enjeux sont là devant nos yeux. Faut-il les citer ? La souveraineté alimentaire en danger, ruine des producteurs de riz Burkinabé, dégradation de la filière rizicole, consommation de céréales douteuses etc. Bonjour donc l’émigration des jeunes et les noyades dans la Méditerranée, les échecs de lutte contre la pauvreté endémique de nos pays… Quel « médicament » faut-il dans l’ordonnance médicale du Faso ?
Quand mettrons-nous fin aux chiffres négatifs et aux lamentations africaines sur ce continent riche de son sous-sol, de sa faune et de sa flore ? Le réveil du Faso permet la confiance et la lutte pour l’intégrité de nos frontières et de notre culture de la vérité. Ce sont les Africains qui vaincront ou périront. Il faut choisir et le Burkina a décidé de faire de bons choix dorénavant. Rien, avons-nous entendu, ne sera comme avant !
Jour J-combien ?
C’est le 1er janvier 2015, faites le compte ! À l’orée de cette mise en œuvre d’un projet mortifère, il n’y a pas de quoi se réjouir pendant ces fêtes de fin d’année. Sonnons plutôt le glas pour les paysans du Burkina et de l’Afrique occidentale !
Plus rien ne sera comme avant ? Alors, il faut agir (sinon réagir) au plus tôt. Rien ne laisse supposer, à l’état actuel des choses, que les braves « hommes à la daba » seront les perdants de ce vent nouveau qui souffle dans les rues et les champs du Faso. Pour ce faire, tout le monde doit se sentir impliqué.
Car le panier de la ménagère, surtout la qualité de ce que nous consommons, concerne toutes les populations du Faso, urbaines et rurales. Pourquoi d’autres maux nous viendraient-ils de l’extérieur ? Avec notre propre bénédiction ?
L’Afrique de l’Est a déjà dit « NON », les Africains de l’ouest sont-ils moins hardis ou bien les politiques ont-ils déjà « mangé l’argent » comme dit le jargon africain ?
Souvenons-nous que nous sommes tous des enfants de paysans et de paysannes ! Si vous remontez deux ou trois générations en arrière, quel Burkinabé, aujourd’hui, peut-il soutenir que son grand-père n’a jamais cultivé la terre ? A la daba ?
Et pourquoi cette insouciance insupportable sur tous ceux qui vivent de l’effort quotidien de leur « travail de la terre » ? Faut-il poser une autre question plus énigmatique : « Qui est contre les paysans du Faso ? »
Au fond, qui veille sur les intérêts des paysans au Burkina ? Un ministère ? Une Institution ? Les Sages religieux et civils ? Des « intellectuels » ? Le gouvernement de « Transition » ? Les paysans eux-mêmes ? Un choix doit être fait et il souffre d’attendre. C’est une question de jours…
Neer-Songo
*Cf. http://www.abcburkina.net/
*Théorie et doctrine économique qui préconise la suppression de toute entrave aux échanges et la liberté des transactions internationales. (Larousse)
NDLR: Le titre est de l’auteur