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Malgré le Ceta, très peu de viande canadienne sur le marché européen

Web-agri | 8 septembre 2021

Malgré le Ceta, très peu de viande canadienne sur le marché européen

by Laure Sauvage

Les exportations canadiennes de viande bovine « sans hormones » à destination de l’Union européenne, coûteuses et peu compétitives, peinent à vraiment décoller.

Le Ceta, accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne, entrait en application provisoire le 21 septembre 2017. Avec lui, l’ouverture progressive d’un contingent d’exportation de viande bovine canadienne sans droits de douanes sur le marché commun européen. Quatre ans plus tard, il est loin d’être atteint.

D’après les chiffres de la Canadian Cattlemen’s association (CCA) - l’équivalent canadien de l’interprofession bovine française -, le contingent ouvert en 2020 vers l’UE à 27 s’élevait à 24 720 tonnes équivalent carcasse (tec) de viande fraîche. Mais seulement 879,7 tec y ont été exportées (dont 59 vers la France), pour environ 15 millions de dollars canadiens. C’est seulement 3,6 % du contingent alloué et 0,12 % du volume total de viande bovine canadienne exportée.

Pour pouvoir exporter vers l’Union européenne, les éleveurs canadiens doivent se conformer à sa réglementation, qui proscrit notamment l’utilisation d’hormones. Or, le Canada autorise depuis les années 1960 six stimulateurs de croissance hormonaux* pour les bovins, dont la fabrication et l’usage sont régis par la Direction des médicaments vétérinaires du gouvernement.

Le Canada devait donc créer une filière spécifique garantie « sans utilisation d’hormones » à destination de l’UE. Fin 2016, nous interviewions à ce sujet le directeur des relations gouvernementales et internationales de la CCA, John Masswohl. Il expliquait que l’ouverture du marché européen représentait « une opportunité très importante » pour une filière structurée pour « exporter 90 % de sa production ».

Mais il pointait le « défi » que cela représente pour les éleveurs canadiens. De fait, produire sans utiliser d’hormones leur impose de garder les animaux plus longtemps et génère pour eux un surcoût important, évalué alors à 20 %. Sans compter les freins techniques et administratifs.

Aujourd’hui, tandis que la demande a explosé sur des marchés moins exigeants sur le plan sanitaire, peu d’éleveurs canadiens se sont lancés dans l’aventure européenne.

Fawn Jackson, la nouvelle directrice des relations gouvernementales et internationales de la CCA, souligne toutefois une hausse des exportations vers l’UE à 27 ces trois dernières années : 413,6 tec en 2018, 494,6 tec en 2019, 879,7 tec en 2020.

Elle insiste sur l’« impatience » de la filière à accroître les exportations de bœuf vers l’Europe, « car il s’agit d’un marché de grande valeur pour les produits canadiens », et sur l’accompagnement dont le CCA peut faire bénéficier ses adhérents. Tout en concédant que certains éleveurs s’inquiètent de la viabilité future du marché européen pour leurs produits.

D’autre part, Fawn Jackson déplore un déséquilibre commercial important : « nous sommes déçus que les producteurs de l’UE exportent près de 10 fois plus de bœuf au Canada que nous vers l’UE. Nous voudrions un commerce plus équilibré à l’avenir, ce qui profiterait à la fois aux producteurs de bœuf canadiens et européens ».

Le contingent d’exportation de viande bovine fraîche alloué par l’UE au Canada est de 29 860 tec en 2021. Il sera relevé à 35 000 tec à partir de 2022.

*Trois hormones naturelles (estradiol, progestérone, testostérone) et leurs versions synthétiques (zéranole, acétate de trenbolone et acétate de mélengestrol) sont autorisées au Canada.

Traçabilité : des défaillances relevées

En septembre 2019, la Direction générale de la santé et de la sécurité alimentaire de la Commission européenne a réalisé un audit au Canada, révélant des défaillances en matière de traçabilité des bovins admissibles à l’exportation vers l’UE. Elle a établi une liste de recommandations : réévaluation des établissements de transformation des aliments, amélioration des bases de données et des contrôles… Interpelée à ce sujet, la commissaire européenne à la santé et à la sécurité alimentaire a répondu fin 2020 que ces défaillances n’ont « aucune incidence sur la conformité du bœuf canadien avec les exigences de l’UE relatives à la non-utilisation d’hormones de croissance. » et que les autorités canadiennes ont mise en place des mesures correctives assorties d’un « plan d’action satisfaisant ». Lire ici une synthèse de l’audit, en français.


 source: Web-agri