Maroc-Égypte : révision approfondie de l’accord de libre-échange après les restrictions du Caire sur l’automobile
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Barlamane.com | 28 février 2025
Maroc-Égypte : révision approfondie de l’accord de libre-échange après les restrictions du Caire sur l’automobile
par Badr Tadlaoui
Le Maroc et l’Égypte réexaminent de manière approfondie leur accord de libre-échange après que les autorités égyptiennes ont imposé des restrictions aux exportations marocaines de véhicules. Mustapha Baitas, porte-parole du gouvernement marocain, a confirmé jeudi 27 février que des discussions étaient en cours entre les responsables du commerce des deux pays, soulignant néanmoins que les relations bilatérales demeuraient «excellentes.»
Selon plusieurs médias des deux rives, Rabat aurait adopté des mesures de réciprocité, limitant l’entrée de produits égyptiens sur son territoire en réaction à une décision perçue comme un frein arbitraire à son industrie automobile. Premier exportateur automobile du continent africain, le Maroc a enregistré en 2024 des ventes de véhicules à l’international totalisant 157 milliards de dirhams grâce aux performances industrielles de Renault à Tanger et Casablanca ainsi qu’à Stellantis à Kénitra. Le secteur, qui représente à lui seul près de 25 % des exportations marocaines de biens, bénéficie d’une intégration poussée aux chaînes de valeur mondiales avec un taux d’intégration locale dépassant désormais 65 %. Or, Le Caire justifie l’interdiction d’entrée des voitures marocaines sur son marché par le non-respect de «critères techniques» alors que ces mêmes modèles sont homologués selon des standards européens parmi les plus rigoureux au monde.
Tout passer en revue
L’accord de libre-échange entre Rabat et Le Caire s’inscrit dans le cadre de la zone d’Agadir, qui regroupe également la Jordanie et la Tunisie et œuvre à faciliter les échanges intra méditerranéens. Pourtant, malgré cet engagement à la libéralisation commerciale, les relations économiques entre les deux pays restent asymétriques. L’Égypte bénéficie d’un accès privilégié au marché marocain pour des secteurs comme la pétrochimie, le textile et l’agroalimentaire, lui permettant d’asseoir une balance commerciale structurellement excédentaire à l’égard du Maroc.
Le déficit commercial du royaume chérifien à l’égard de l’Égypte s’est creusé en 2024, atteignant 804 millions de dirhams contre 475 millions un an plus tôt, soit une détérioration de près de 70 %. Cette aggravation découle notamment de la progression des importations de produits pétroliers raffinés et de matériaux plastiques en provenance d’Égypte, dans un contexte où le dirham est resté relativement stable face au dollar, limitant l’effet d’amortissement des variations des prix à l’importation.
Un responsable marocain a reconnu auprès de Barlamane.com que «des obstacles» entravaient l’accès des produits marocains au marché égyptien, mais a assuré que la situation était gérée «dans le cadre des relations distinguées qui unissent les deux pays.» Reste que cette situation incarne les fragilités persistantes des accords commerciaux Sud-Sud où les barrières non tarifaires continuent de restreindre l’accès effectif aux marchés, en dépit des engagements de libre-échange.