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Un assureur bulgare dépose une demande d’arbitrage d’un demi-milliard d’euros contre la Roumanie

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Euractiv | 24 mai 2024

Un assureur bulgare dépose une demande d’arbitrage d’un demi-milliard d’euros contre la Roumanie

Par : Krassen Nikolov

La compagnie d’assurance bulgare Euroins Insurance Group (EIG) et sa société mère Eurohold ont officiellement déposé une demande d’arbitrage de 500 millions d’euros contre le gouvernement roumain. Un litige qui marque les premières tensions entre les deux voisins depuis leur adhésion à l’UE, mais que le président roumain Klaus Iohannis a salué comme un acte de démocratie.

La plainte a été déposée auprès du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) à Washington, DC.

En octobre de l’année dernière, le holding bulgare a averti qu’il poursuivrait le gouvernement de Bucarest pour avoir révoqué la licence de l’unité Euroins en Roumanie dans ce qu’il a décrit comme une « prise de contrôle hostile ». Toutefois, le gouvernement roumain n’a pas saisi l’occasion de régler le différend à l’amiable.

« Eurohold et EIG ont entamé la procédure d’arbitrage en raison du non-respect par l’État roumain de ses obligations en vertu du traité bilatéral d’investissement entre la Bulgarie et la Roumanie, y compris son obligation de fournir un traitement juste et équitable aux sociétés », affirme l’assureur bulgare.

Le 17 mars 2023, l’Autorité des services financiers (ASF) en Roumanie a retiré la licence d’Euroins Roumanie, dans ce qu’Eurohold a décrit comme une décision « arbitraire et discriminatoire » en violation du droit européen et international, ce qui a conduit plus tard, en juin 2023, à la faillite de ce qui avait été un leader dans le secteur local de l’assurance et l’un des plus grands investisseurs étrangers dans le pays.

En octobre, le Premier ministre bulgare de l’époque, Nikolaï Denkov, avait déclaré à Euractiv lors d’une interview exclusive qu’il avait soulevé la question avec son homologue roumain Marcel Ciolacu, insistant pour que la société bulgare soit traitée dans le plein respect du droit de l’UE.

L’affaire Euroins semble être la première tension majeure entre la Bulgarie et la Roumanie depuis que les deux pays ont rejoint l’UE en 2007.

La question de la licence d’Euroins a également été soulevée par le président bulgare Rumen Radev lors de ses entretiens avec son homologue roumain Klaus Iohannis, M. Radev ayant exhorté les responsables politiques roumains à ne pas s’immiscer dans l’affaire Euroins.

Le régulateur roumain a fondé sa décision sur une analyse de solvabilité de l’EIG, qui présenterait un déficit de solvabilité de plus de 400 millions d’euros et un déficit de capital minimum de plus de 250 millions d’euros.

La société bulgare a pour sa part démenti ces informations, citant les résultats d’inspections récentes de ce même régulateur, qui n’ont révélé aucun problème.

« Nous protégerons nos investissements par tous les moyens légaux et licites. L’État roumain a décidé de ne pas aborder les questions que nous avons soulevées. Il n’a même pas essayé d’en discuter avec nous. […] Nous poursuivons donc la procédure d’arbitrage, qui est la prochaine étape logique », a déclaré Todor Danailov, PDG d’EIG.

M. Iohannis avait été interrogé sur le retrait de la licence de la société bulgare par les eurodéputés irlandais Gunnar Beck et Clare Daly (Parti de gauche) lors d’une visite au Parlement européen en février.

Dans sa réponse, M. Iohannis avait souligné que l’État de droit prévalait en Roumanie.

« Nous avons un système judiciaire indépendant, et ce n’est pas moi qui le dis. La Commission [européenne] le dit, et vous le dites en adoptant le rapport de la Commission sur la suppression du mécanisme dit de coopération et de vérification », avait-t-il déclaré à l’époque, ajoutant qu’« en plus d’une justice indépendante et d’un ministère public fort, il est important d’avoir des régulateurs indépendants ».

« J’ai entendu dire qu’un régulateur avait un problème avec une entreprise. Comme dans toute démocratie, si quelqu’un n’est pas satisfait, les parties vont au tribunal. C’est ce qui s’est passé. Et le tribunal (roumain) a jugé que la décision était correcte. C’est ainsi que je conçois l’État de droit. Tout le monde doit accepter le résultat », a ajouté le président roumain.


 source: Euractiv