Traité UE-Mercosur : « Emmanuel Macron doit agir pour stopper les négociations »
l’Humanité | 29 septembre 2024
Traité UE-Mercosur : « Emmanuel Macron doit agir pour stopper les négociations »
par Luis Reygada
« Je n’ai jamais été aussi optimiste quant à (la possibilité de conclure) l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur ». Dans un discours prononcé en marge de son passage à l’Assemblée générale des Nations unies, à New York, mercredi dernier, le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva a rappelé qu’il était prêt à signer le traité de libre-échange entre l’UE et le bloc sud-américain.
« Il appartient désormais à l’UE de conclure les négociations, a-t-il ajouté, précisant qu’il ne dépendait que des Européens de « signer lors de la réunion du G20 au Brésil », en référence au sommet du groupe qui se tiendra à Rio de Janeiro en novembre.
Lula est aussi apparu aux côtés de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui a confirmé sur X avoir « discuté des négociations entre l’UE et le Mercosur ainsi que des points en suspens à traiter », tout en se réjouissant des « nombreuses opportunités (qui) se profilent à l’horizon ».
« la France doit construire une minorité de blocage pour stopper cet accord »
« Nous alertons médias et parlementaires depuis début septembre : contrairement à ce qu’Emmanuel Macron a prétendu en février dernier, les négociations n’ont pas été stoppées, a publié sur X le Collectif national Stop-Mercosur, (au contraire) celles-ci se poursuivent et pourraient aboutir rapidement ».
Pour Maxime Combes, chargé de suivi des politiques commerciales pour l’Aitec (Association Internationale de Techniciens Experts Chercheurs) et co-animateur du collectif, les déclarations du président Lula n’ont rien de nouveau mais confirment une nouvelle fois que la France n’a pas enterré l’accord. « Raison pour laquelle il faut exiger d’Emmanuel Macron qu’il exprime avec clarté que la France n’en veut pas », insiste l’économiste. « Plus encore : la France doit construire une minorité de blocage pour stopper cet accord, si nécessaire au Conseil de l’UE, et obtenir le réexamen et le retrait du mandat dont dispose la Commission pour négocier l’accord », ajoute-t-il.
Le projet de traité – l’un des plus vastes accords de libéralisation du commerce au monde et dont les discussions ont commencé il y a maintenant vingt-cinq ans – entend supprimer la majorité des droits de douane entre l’UE et le Mercosur, composé du Brésil, de l’Argentine, de l’Uruguay, du Paraguay, pays récemment rejoints par la Bolivie.
Soit un espace économique de plus de 700 millions de consommateurs. Si un accord politique avait été trouvé en 2019, plusieurs pays membres de l’Union européenne, dont la France, ne l’ont pas ratifié, pour cause de divergences sur divers points tels que les sauvegardes environnementales et l’ouverture des marchés publics.
Des négociations opaques
Selon l’agence Reuters, une source diplomatique européenne a déclaré que « des progrès avaient été réalisés en vue d’aplanir les divergences lors d’une réunion en tête-à-tête des négociateurs à Brasilia les 5 et 6 septembre », tout en reconnaissant qu’ « il y a encore un fossé ». De son côté, le Collectif national Stop-Mercosur a dénoncé la tenue d’un nouveau round de négociations début octobre au Brésil, organisé « en toute opacité, et sans que ni les parlementaires ni le public ne soient informés de leur contenu ».
Dans le cadre des élections européennes de juin dernier, plusieurs formations politiques de gauche, associations et ONG avaient réclamé un débat sur la nature des traités à mettre en place comme alternative aux accords de libéralisation commerciaux. « Il faut fonder nos relations politiques, commerciales et géopolitiques sur de nouveaux principes : solidarité, égalité, coopération, soutenabilité, démocratie, afin « de garantir une bonne vie pour tous », plutôt que « d’assurer des profits pour quelques-uns » », avait indiqué une plateforme réunissant de nombreuses organisations de la société civile française et brésilienne. Des deux côtés de l’Atlantique, nombreuses sont les voix qui ne comptent pas se taire pour faire tomber un accord de libéralisation « obsolète, néocolonial et déséquilibré ».