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Douze raisons pour lesquelles nous disons NON à l’accord de libre-échange du Mercosur - Union européenne

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Douze raisons pour lesquelles nous disons NON à l’accord de libre-échange du Mercosur - Union européenne

par Alianza Biodiversidad | février 2018

Traduit par bilaterals.org

Notre agriculture, nos ressources naturelles et notre alimentation sont exposées à un risque imminent

L’éventuelle signature de l’accord que les pays du Mercosur visent à approuver urgemment représente une immense menace pour nos droits conquis à travers des luttes sociales héroïques, pour notre souveraineté, pour nos économies et pour la possibilité de notre intégration régionale respectant la justice socioéconomique et environnementale. Nous partageons ici douze raisons pour lesquelles nous nous opposons et vous invitons à nous rejoindre contre la signature de l’accord qui aura un impact sur notre production alimentaire, notre souveraineté alimentaire et nationale, et sur nos biens communs. Nous lançons ici un appel populaire, en amont de la prochaine réunion des négociateurs à Asunción, à se mobiliser pour proclamer un NON retentissant à l’Accord dans son ensemble.

1- Parce que l’accord a été négocié secrètement et sans consulter la société civile, les parlements et les associations sociales des secteurs qui seraient touchés dans nos pays. Les seuls documents qui ont été rendus publics, qui ne sont pas définitifs et ne tiennent pas compte de l’historique des négociations (et donc du processus de concessions mutuelles dans son cours) sont provenus de fuites, dont celles publiées par Greenpeace Pays-Bas sous le nom « Mercosur Leaks » (http://bilaterals.org/?-eu-ftas-&lang=es).

2- Parce que l’accord vise à profiter aux grandes entreprises du nord et aux élites agro-exportatrices du Mercosur, déguisé en « accord d’association », alors que l’agenda des négociations entre les deux blocs intègre les éléments les plus néfastes du libre-échange, qui est de moins en moins libre et traite de sujets qui vont au-delà de ce qui est typiquement commerciale, affectant sérieusement la capacité et la marge de manœuvre des gouvernements en matière de politiques publiques d’intérêt général.

3- Les élites du Mercosur cherchent, avec cet accord, à renforcer les exportations basées sur le bétail industriel et le soja. Si l’accord est signé, il approfondira les problèmes que l’agro-industrie est déjà en train de produire dans la région : déforestation, expulsion des paysans, pollution du fait des agrotoxines, destruction des économies régionales, perte de souveraineté alimentaire et vulnérabilité alimentaire croissante. Les paysans et les petits agriculteurs familiaux produisent la majeure partie de la nourriture dans la région. Le modèle imposé par l’Accord favorise le contrôle territorial par l’industrie agroalimentaire et approfondira la violence, la criminalisation et la persécution que subissent, aujourd’hui, les communautés paysannes dans toute la région.

4- Parce que nos semences seront criminalisées et privatisées et que leur échange et leur libre circulation seront interdits, car tous les aspects liés à la réglementation de la propriété intellectuelle sont négociés dans l’accord. Dans le domaine des semences, le texte qui a fuité indique que « chaque Partie protège les obtentions végétales, conformément à la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales, adoptée à Paris le 2 décembre 1961, révisée pour la dernière fois à Genève le 19 mars 1991 (ACTA UPOV 1991) ». Cela signifie l’imposition des lois Monsanto dans tous nos pays.

5- Le même chapitre sur la propriété intellectuelle impose l’adoption du Traité de coopération en matière de brevets (Traité PCT), qui favorise la facilitation de la délivrance de brevets à l’échelle mondiale. Cela peut se traduire par l’imposition de la possibilité de brevets sur le vivant, une question qui est actuellement rejetée par les législations nationales dans le Mercosur. En outre, le chapitre en négociations impose de nouvelles restrictions à l’utilisation des données d’essai dans l’industrie pharmaceutique, ce qui pourrait restreindre la production de médicaments génériques, restreindre le droit d’accès à la santé et imposer de lourdes contraintes sur les budgets nationaux de la santé publique qui serait fondée sur une augmentation du coût des médicaments disponibles.

6- Les entreprises nationales seront délogées car le chapitre sur les services permet aux investissements étrangers des sociétés qui établissent leurs filiales dans un pays de l’autre partie, d’être soumis au traitement préférentiel offert par l’accord. Cela signifiera un retour en arrière puisque la position initiale du Mercosur était de ne pas toucher aux questions d’investissement.

7- L’accord limite sérieusement la capacité de nos pays à définir des programmes et des politiques d’importance majeure, tels que l’adoption de mesures contre le changement climatique, la sécurité et la souveraineté alimentaires, et le droit des peuples autochtones à une consultation préalable et à être informés. Il répond à un objectif clair d’approfondissement du modèle d’exportation primaire et d’adoption croissante d’engagements limitant la mise en œuvre de politiques en faveur de la diversification des moyens de production, des politiques souveraines de la science, de l’innovation et de la recherche, la promotion industrielle et la promotion des entreprises alternatives et durables.

8- Les entreprises européennes pourraient avoir accès aux appels d’offres publics des entités gouvernementales à l’échelle la plus étendue des circonscriptions territoriales. En effet, les exigences de l’Union européenne en matière de marchés publics impliquent l’imposition des conditions de l’accord plurilatéral sur les marchés publics de l’OMC, qui n’a été signé par aucun des pays membres du Mercosur, qui n’y sont donc pas tenus.

9- Alors que les objectifs de promotion de l’intégration des PME dans les chaînes de valeur transnationales sont déclarés, l’encadrement de la relation bi-régionale dans de stricts systèmes de libre marché rend peu crédibles les déclarations, déjà faibles, en faveur du développement économique. Renoncer aux achats publics en tant qu’instrument de promotion du développement productif dans les secteurs de l’industrie naissante ou de l’économie sociale et solidaire, est un signal très négatif pour les PME et constitue une contradiction flagrante avec les objectifs dits de promotion de ces unités de production.

10- Les mesures sanitaires et phytosanitaires continueront d’être utilisées par l’UE pour empêcher l’accès à son marché des produits agricoles du Mercosur, plutôt que comme un outil légitime pour protéger la santé de sa population. C’est en effet ce que l’UE a toujours fait. Les discussions intenses au sujet du chapitre sur les mesures sanitaires et phytosanitaires, reflétées dans la version qui a fuité en juin 2017, et devenues encore plus intenses selon des sources à Bruxelles, suggèrent que l’UE continuera à approfondir cette tendance.

11- Le chapitre sur les entreprises d’État, que l’UE a ajouté à la table de négociations, mènera les États à s’engager à ce que leurs entreprises fonctionnent selon des considérations commerciales strictes, limitant leur capacité à influencer la promotion de certains secteurs de production, et dévalorisant la fonction publique qui œuvre au profit de l’intérêt général que l’État se doit également de garantir à travers ses entreprises. Il s’agit d’un sujet qui se retrouve dans divers accords de libre-échange de l’UE, et dont le contenu présente quelques aspects communs.

12- L’incorporation d’un chapitre sur le commerce électronique introduit un autre front d’asymétries dans la relation bi-régionale. Parmi les éléments stratégiques de ce chapitre se trouve l’obligation d’assurer la libre circulation des données, la protection des codes-source et la continuité de réglementations nationales aussi laxistes que possible à l’égard des sociétés transnationales. Le chapitre cherche à graver dans le marbre les conditions d’hégémonie des grandes entreprises du Nord et à approfondir leur capacité à concentrer les richesses. La mise en place de ces standards ne fait que renforcer l’oligarchie transnationale au sein de l’économie numérique et laisse peu de place à la construction de politiques qui présentent des alternatives à une insertion périphérique des économies de la région dans le cadre de la Révolution 4.0.

Enfin, nous soulignons que cet accord constituera un pas en avant vers un accord de libre-échange encore plus complet qui, avec de nouveaux chapitres, impliquera de nouvelles menaces pour nos peuples.

Ce sont les douze raisons principales pour lesquelles nous estimons que l’accord de libre-échange Mercosur - Union européenne ne peut être approuvé.

Document produit par Alianza Biodiversidad constituée de :

• Acción por la Biodiversidad, Argentina
• REDES - Amigos de la Tierra, Uruguay
• Grupo Semillas, Colombia
• Acción Ecológica- Ecuador
• Anamuri, Chile, por la Campaña Mundial de la Semilla de Vía Campesina América
Latina
• BASE-IS, Paraguay
• COA, Colectivo por la Autonomía, México
• CLOC-Via Campesina
• Red de Coordinación en Biodiversidad, Costa Rica,
• Centro Ecológico, Brasil
• ETC Group, México
• GRAIN, Argentina y Chile

Nous vous invitons à envoyer vos signatures à ce document ici


 Fuente: Alianza Biodiversidad